Les télétravailleurs ont droit aux titres-restaurant dès lors que leurs collègues sur site en bénéficient, affirme la Cour de cassation dans deux arrêts du 8 octobre 2025.
Le cadre juridique du titre-restaurant et du télétravail
L’attribution de titres-restaurant n’est pas une obligation légale pour l’employeur, mais elle constitue un avantage social très répandu. En contrepartie d’un régime fiscal et social favorable, elle permet à l’entreprise de participer aux frais de repas des salariés lorsque leur horaire journalier comprend une pause déjeuner (article R. 3262-7 du Code du travail).
Les titres-restaurant peuvent être utilisés pour acheter des produits directement consommables mais également des produits non directement consommables (dans le cadre d'un dispositif exceptionnel valable jusqu'en 2026).

Ni le lieu de travail, ni le mode d’organisation – présentiel ou télétravail – ne sont des conditions exigées par la loi pour accorder ce bénéfice. Cette interprétation a d’ailleurs été confirmée par la Cour de cassation dans des décisions antérieures (notamment Cass. soc. 20 févr. 2013, n° 10-30028).
En parallèle, le Code du travail impose que le télétravailleur bénéficie des mêmes droits que le salarié travaillant sur site, en vertu de l’article L. 1222-9. Cette égalité de traitement a été largement débattue durant la crise sanitaire, période pendant laquelle de nombreuses entreprises ont modifié leurs pratiques sans adapter leurs usages.
Une jurisprudence désormais tranchée par la Cour de cassation
Dans deux arrêts majeurs du 8 octobre 2025, la Cour de cassation met fin aux divergences jurisprudentielles apparues pendant le Covid-19. Elle pose clairement le principe suivant : les télétravailleurs ont droit aux titres-restaurant dans les mêmes conditions que les salariés sur site, dès lors que leurs horaires de travail le justifient.

Dans la première affaire (n° 24-12.373), l’employeur avait cessé de verser les titres-restaurant à un salarié en télétravail durant deux ans. La Cour valide la condamnation de l’entreprise au versement d’un rappel de salaire de 1 700 €, en rappelant que le télétravail ne peut justifier une inégalité de traitement, sauf élément objectif.
La seconde affaire (n° 24-10.566) concerne une entreprise ayant suspendu unilatéralement les titres-restaurant après avoir fermé le restaurant d’entreprise pendant le confinement. La Cour rappelle que l’usage en vigueur ne pouvait être supprimé sans respecter les règles applicables à sa dénonciation, notamment l’information du CSE, des salariés et un délai de prévenance suffisant.
La Cour souligne surtout que tous les salariés placés en télétravail se trouvaient dans une situation identique, et que l’attribution des titres-restaurant devait leur être maintenue sans discrimination fondée sur leur situation antérieure.
Les conséquences pratiques pour les employeurs
Avec ces deux arrêts, la Cour de cassation clarifie la doctrine et pose une norme d’égalité stricte entre salariés en télétravail et sur site. Cela implique pour les employeurs plusieurs obligations concrètes :
- Attribuer les titres-restaurant à tous les salariés télétravailleurs, dès lors que leurs horaires incluent une pause repas.
- Éviter toute différence de traitement entre salariés exerçant les mêmes fonctions à distance ou en présentiel.
- Respecter les règles de dénonciation d’un usage si l’attribution des titres-restaurant résulte d’une pratique répétée dans l’entreprise.
- Actualiser les politiques internes (accords collectifs, chartes du télétravail, règlements intérieurs) pour intégrer ces obligations.
En cas de litige, les employeurs s’exposent à des rappels de salaire sur plusieurs années, sur le fondement de l’égalité de traitement et du respect des usages professionnels.
Vous souhaitez sécuriser vos pratiques RH face aux évolutions du droit du travail ?
L’Académie RH vous accompagne avec des formations personnalisées pour mettre à jour vos obligations juridiques.
FAQ
Les employeurs sont-ils obligés de fournir des titres-restaurant ?
Non, l’attribution de titres-restaurant est facultative. Mais si l’employeur les distribue à certains salariés, il doit respecter le principe d’égalité de traitement.
Les télétravailleurs peuvent-ils être exclus du dispositif de titres-restaurant ?
Non. S’ils remplissent les mêmes conditions (présence d’un repas dans leur horaire de travail), ils doivent en bénéficier au même titre que les salariés sur site.
L’employeur peut-il suspendre les titres-restaurant en période de télétravail massif ?
Non, sauf à dénoncer l’usage selon la procédure légale. Une suspension unilatérale est illicite.
Que faire si le télétravailleur avait auparavant accès à une cantine ?
La suppression des titres-restaurant ne peut être justifiée par ce seul motif. Si la cantine est fermée, tous les salariés sont dans une situation équivalente.
Un salarié peut-il obtenir un rappel de titres-restaurant ?
Oui. En cas de traitement inégal, le salarié peut saisir les prud’hommes pour obtenir un rappel de salaire sur plusieurs mois, voire années.